FICHE DE POSTE
- Une raquette de Badminton (bonne marque pour une tension correcte)
- 6 à 8h par jour (de mi-septembre à mi-novembre, 5 jours/semaine, 1 semaine sur deux. (Pour les lèves tard, possibilité de commencer la journée à 11h30/12h)
- Pour 1 à 4 ruches suivant l’installation
- Coup droit et revers corrects privilégiés (mais pouvant faire partie de la formation- ⚠️ au « tennis Elbow »)
- Tenue correcte exigée (au départ, si pas rassuré et pendant le temps de la rencontre entre les abeilles et les gardiens, on peut venir avec une tenue d’apiculture)
- Rémunération : Correction oculaire pour se défaire de ses lunettes définitivement, cours de philosophie particulier avec le plus grand philosophe jamais né : la nature, cours de biologie et d’entomologie de terrain (entomologie est l’étude des insectes), cours d’humilité salutaire, sentiment d’une réelle utilité, gain de 5 à 10 ans de vie : évacuation du stress, méditation profonde, air frais, soleil, etc., reconnexion avec le réel. Et parfois si vous avez un peu de chance, vous aurez droit à une séance gratuite d’apipuncture (soin par les piqûres d’abeilles).
Qui nous refuse la paix… le frelon asiatique ?!
Voilà une belle bête de combat, un prédateur redoutable aux mandibules puissantes qui dans son environnement naturel rencontre une résistance bien organisée qui fait que, malgré son appétit vorace, il est contenu dans un espace délimité, cerné comme le fait systématiquement l’équilibre de la vie, la nature.
Heureusement, l’ingénieux humain, le dieu du royaume terrestre -celui qui maîtrise tout, du climat aux « plans des sols » (⚠️ je suis ironique évidemment)- a toujours des solutions. Maîtrisant à l’envie toute la technologie, il invente dans son cerveau gigantesque des solutions techniques capables de résoudre en quelques années un ordre qui a mis des siècles, que dis-je, des éons, à se mettre en place. Avec des grillages, des pièges à hormones, des filets électriques, il a réussi à éradiquer ce géant d’Asie en un rien de temps !
Malheureusement, ou heureusement devrions-nous écrire, la vie étant vivante et non pas un programme informatique qui ne peut faire autrement que de se dérouler toujours identique à lui-même, la vie elle s’adapte. Voilà le frelon qui évite les pièges et qui finit quoi qu’en disent les apiculteurs à remporter la partie. Les abeilles restent prostrées dans leurs ruches sans aller chercher leur nourriture : pollen, nectar qui deviendra miel, eau, ni entretenir leur habitat en évacuant ce qui doit être évacuer ! Parce que dehors, à la porte de leur petit nid, elles entendent les trompettes de la mort chanter leur mélodie funeste ! Parce que, jour après jour, la puissance de cet ennemi grimé de noir et de jaune atteint leur moral jusqu’à ce qu’elles se sentent incapables de résister, jusqu’à e qu’elles renoncent à leur souveraineté. Là encore, comme pour nous, il ne s’agit pas de la réalité, mais du narratif, de ce qu’elles croient. Pauvres anges de Dieu réduites à se penser larves. Alors elles meurent ! En masse ! Et si l’apiculteur embarqué dans son narratif qui lui fait prendre des vessies pour des lanternes ne lui portait pas du sirop fast-food pour les maintenir, des grilles ceci, des grilles cela, des antibiotiques, à ce jour, il n’y aurait plus aucune abeille d’élevage vivante en Europe !
Car ne vous y trompez pas, ce frelon comme tous les fléaux qui entrent dans nos vies ne sont que des représentants des archétypes suivants : les chevaliers de l’Apocalypse ! Je rappelle pour ceux qui n’ont pas ouvert internet depuis quatre ans que Apocalypse veut dire « révélation ». Donc les chevaliers qui amènent à voir le réel ! Et le réel, C’EST QUE NOUS AVONS FAIT N’IMPORTE QUOI !!! SI, si !
Revenir aux fondamentaux : la raquette de Badmington
Alors, humblement, je vous propose une solution. En revenant aux fondamentaux, sans me dire que je pouvais trouver une solution génialissime venue de mon esprit brillant, je suis allé me poster devant mes ruches chéries et j’ai laissé venir… instantanément, ce qui m’est apparu le plus juste était d’empêcher les frelons de prendre mes belles. Donc un bâton et « PAF ». Oui, revenons à nos basiques, voulez-vous !
Le bâton s’est vite transformé en raquette de badminton pour le confort de mon bras et pour pallier à ma médiocre adresse et voilà mes journées bien remplies ! Nouveau métier à temps complet : Gardien.ne -si vous y tenez ;)- de Ruche ! Six à huit heures par jour, cinq jours par semaine pendant les quinze derniers jours d’octobre. Ou peut-être -il faudra peaufiner la fiche de poste- une semaine sur deux à partir de mi-septembre jusque début ou mi-novembre.
– Ok ! Mais quel est donc le salaire de ce nouveau métier ? Le SMIC est autour de 1500 euros…
– Désolé de vous décevoir, mais ici, il n’y aura d’autre salaire qu’une fois par ans 15 à 20 kg de miel et la multiplication des ruches potentielle.
– Donc c’est un métier réservé à ceux qui possèdent des ruches ?
– Pas du tout, non ! Le salaire comprend une guérison de la folie qui ne vous fait plus penser droit. Car là, dans la nature, à observer cette société exemplaire et tous les cadeaux réservés à ceux qui ont le temps et l’envie de fouiller, de chercher – Et oui la nature n’utilise pas de panneaux publicitaires, ni d’enseignes lumineuses, il vous faudra donc réhabituer vos yeux à voir dans le noir, à voir dans le rien, dans la trame même de la vie. Ne faites pas les yeux ronds, n’importe qui peut le faire. Cela demande juste de l’humilité et du temps.
– 8 heures par jour ?! Mais je vais m’ennuyer ?
– Non. Pas du tout, vous allez surtout vous rendre compte de combien l’on fait semblant de ne pas s’ennuyer quand on ne vit pas simplement comme cela. A côté d’une journée dans la nature au service de quelque chose qui prend toute votre attention et vous libère de la question : suis-je à ma place, vous allez découvrir un film magnifique fait pour vous et uniquement pour vous, unique. Un film dont vous serez le seul porteur. Et le soir, de retour dans le chaud du ventre de votre maison, vous aurez alors des histoires à transmettre. Votre histoire.
– C’est tentant…
Bien sûr que c’est tentant et surtout, pour l’instant, c’est le seul moyen réellement fonctionnel -arrêtez de vous réfugier derrière la technologie, quelle qu’elle soit- de sauver vos abeilles tout en leur offrant ce dont elles ont besoin. Non pas de sirop, mais de vivre leur vie d’abeille. Et en plus notre piègage est sélectif ! Il permet même de laisser hors de ce combat les frelons européens qui viennent parfois prélever une abeille comme les indiens d’Amérique faisaient leur rite de passage en allant tuer ou « marquer » un homme d’une autre tribu.
La nature a horreur du vide… Où sommes-nous ?
Enfin, cela m’amène à vous partager un principe que j’observe finalement tout le temps depuis que je vis dans la nature. La nature a horreur du vide ! Et un territoire, une fonction pas prise est à prendre et sera donc prise que vous soyez d’accord ou non ! Je m’explique : dans la forêt tout espace qui n’a pas de passage permanent voit les ronces, les herbes, puis les arbres arriver. Les arbres ne sont pas immobiles, ils ont juste compris qu’on ne peut prendre que l’espace qu’on gère. Et tout ce qu’on n’habite pas VRAIMENT se retrouve pris par un autre vivant. Vous voulez un jardin, alors circulez dedans tous les jours et partout, sinon vous entretenez une image d’Épinal pour impressionner vos amis et participer à un narratif que vous n’avez jamais écrit et qui plus est nécessitera toujours des machines, de l’énergie -des esclaves donc!- pour réparer votre manque d’honnêteté et de rectitude. Idem pour les ruches ! Si nous possédons des ruches, nous devons être avec, complètement. Le reste n’est qu’un mensonge ! Une construction certes magnifique – quand on lit nos auteurs, nos penseurs, nos philosophes, etc on ne peut qu’être d’accord- mais basée sur du vent, du mensonge. Et ce mensonge risque de nous emporter tous !
Finalement, les frelons d’Asie comme les autres fléaux sont nos frères et soeurs venus nous rappeler que nous sommes tous la vie et que malgré nos délires grandissants, le monde ne sera jamais autre chose que ce qu’il est et que nous y avons une place, même si par les fables de nos sociétés malades, elle peut sembler de plus en plus loin, voire inaccessible, elle reste pourtant bien réelle. Elle est ici, maintenant. Comme pour les abeilles. Comme pour les frelons. Comme pour tout le reste du vivant. Elle nous demande de parfaire et de remplir notre milieu de vie, avec probité. Cela et rien que cela.
Gardien des ruches, gardien des mondes
Pour info, nous ouvrirons l’année prochaine des semaines de méditation intitulées « Gardien des ruches, gardien des mondes » et le personnage auquel je proposais un poste « bénévole » de gardien de ruche comprend ici qu’il aurait dû accepter tout de suite, parce que quelques lignes plus loin, il devient un soin holistique qu’il faudra payer pour recevoir !
Après j’enjoins les gros apiculteurs à mettre en place des réseaux avec des bénévoles et pourquoi pas une grosse association nationale de « gardiens d’abeilles » dont le but sera de fournir sur des périodes définies des gardiens de ruches pour accompagner les apiculteurs.
P.S. Je dis « gardien » parce que je suis un vieux con réactionnaire qui n’aime pas qu’on massacre une langue par pur orgueil, mais les gardiennes sont évidemment les bienvenues ! D’ailleurs ici, nous gardons à tour de rôle, Claire et moi.